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Un esprit sportif

Paul Deshaies
Paul Deshaies

3 juillet 2008

Karine Bellerive

La retraite n'est pas synonyme de farniente pour l'ancien doyen de la Faculté d'éducation physique et sportive. Habité d'une énergie peu commune et d'un optimisme inébranlable, Paul Deshaies continue à agir à titre de commissaire au sein de la Fédération internationale de basketball, en plus de représenter l'UdeS lors de certains événements sportifs et de siéger à différents comités, dont le conseil d'administration de la Corporation du Club de football Vert & Or.

Il faut dire que Paul Deshaies connaît les rouages de l'UdeS comme peu d'autres. L'histoire qui le rattache à l'institution a commencé il y a plus de 40 ans, en 1967, alors qu'il entamait son baccalauréat en activité physique. Après avoir fait ses études aux cycles supérieurs sous le soleil de la Californie, puis de la Floride, il est revenu à Sherbrooke. «À l'époque, les programmes d'éducation physique étaient d'une très grande qualité aux États-Unis, explique-t-il. J'ai eu beaucoup de chance. Après ma maîtrise, alors que je donnais déjà des cours à l'Université de Sherbrooke, on m'a offert un congé payé pour que je puisse aller faire mon doctorat à la Florida State University de Tallahassee, la capitale de la Floride.»

Le jeune père de famille est donc parti avec son épouse et ses deux jeunes enfants, respectivement âgés de moins de trois ans et de trois mois. Il lui est resté de fabuleux souvenirs de cette période de sa vie. «Tallahassee est une ville de services, d'universitaires et de fonctionnaires, souligne Paul Deshaies. On habitait sur le campus, parmi d'autres étudiants qui avaient des enfants. C'était un véritable village : il y avait une garderie, un terrain de golf... À deux ou trois dollars la partie, j'en ai amplement profité!» Cette expérience a également bénéficié à ses enfants, qui sont bilingues depuis ce temps.

Deux ans après son départ, il est revenu au pays pour faire sa thèse sur Une approche psychobiologique dans la prédiction de la performance individuelle des joueurs de hockey junior. Il mentionne que la psychologie du sport était peu connue à l'époque au Québec. «Comme je voulais faire quelque chose d'innovateur, d'inédit, je me suis intéressé aux études réalisées ailleurs, évoque-t-il. À la suite de la série du siècle au hockey, en 1972, on a appris que les hockeyeurs du bloc de l'Est étaient encadrés par des experts en psychologie et en biologie. C'est ce qui m'a mis sur la piste.»

Une série de réalisations

En plus des cours donnés en psychologie du sport, Paul Deshaies a enseigné les statistiques aux étudiants de la Faculté d'éducation physique et sportive pendant un quart de siècle. L'ex-professeur souhaite avoir réussi à faire apprécier cette matière souvent mal aimée. C'était d'ailleurs sa bête noire pendant ses études de 1er cycle. «J'étais bon en maths au secondaire, mais j'ai détesté mes cours de statistique au baccalauréat, dit-il. Comme ce n'était pas obligatoire à la maîtrise, je n'en ai pas fait. Par contre, je devais en faire deux au doctorat...» C'est un professeur passionné qui a finalement transformé son aversion en passion : «Il m'a fait découvrir le plaisir d'analyser des données quantitatives. Il était passionné et ça se sentait.» Soucieux de développer l'esprit critique de ses étudiantes et étudiants, Paul Deshaies s'en est inspiré dans sa pratique. Selon lui, certains chercheurs abusent des statistiques. «Ce n'est pas parce que c'est écrit dans un article scientifique que c'est vrai, clame-t-il. J'espère que j'ai su semer une graine dans l'esprit de quelques étudiants. On peut difficilement s'arroger le mérite de ce que les gens sont devenus, mais si j'ai eu une influence, c'est tant mieux.»

Bien qu'il ait beaucoup aimé transmettre ses connaissances, Paul Deshaies avait besoin de s'investir davantage pour se réaliser pleinement. Il s'est donc impliqué au sein du comité de direction de la Faculté d'éducation physique et sportive à titre de directeur du Département de kinanthropologie, de 1977 à 1980, et il a assumé les fonctions de vice-doyen dans les années 90. Il est ensuite devenu doyen par intérim, à la fin août 1998. Officiellement nommé un an plus tard, il a été doyen jusqu'à sa retraite en 2007. «C'est quelque chose que j'ai adoré faire, confie-t-il. Ça me permettait d'être au milieu de l'action, tant au niveau facultaire qu'au niveau institutionnel. On dispose de beaucoup d'information. On voit l'institution évoluer, et on participe à son évolution.»

L'une des réalisations dont il est le plus fier est d'avoir réussi à maintenir la Faculté en vie. En raison de difficultés financières, il a été sérieusement envisagé de la transformer en département. «On ne voyait que cette solution au problème, relate-t-il. Mais j'ai finalement réussi à convaincre la direction et le conseil d'administration de conserver le cadre facultaire. Nous avons travaillé très fort au niveau du recrutement pour augmenter la fréquentation. Et nos efforts ont porté fruit!» L'ex-doyen a également participé à la création du volet en intervention éducative en activité physique du doctorat en éducation, offert conjointement avec la Faculté d'éducation.

Tirer le meilleur des gens

Paul Deshaies souligne par ailleurs qu'il ne serait arrivé à rien s'il n'avait pas su bien s'entourer. Il estime ainsi que le leadership est un processus qui amène des gens à investir leurs efforts dans la poursuite d'objectifs communs. «J'ai eu une expérience de doyen heureuse en grande partie parce que j'ai été capable de déléguer les responsabilités, de faire confiance aux autres membres de la direction et de la Faculté, dit-il. Je suivais l'évolution des dossiers, mais c'est eux qui en avaient la responsabilité. Je ne regardais pas constamment au-dessus de leur épaule.» La clef est selon lui de s'entourer de gens compétents, de savoir exploiter leur créativité et leur imagination et de les féliciter pour leurs succès.

Tout au long de sa carrière, l'ex-doyen n'a pas perdu de temps avec les regrets. «J'ai appris cela du sport : il y a des choses qu'on ne contrôle pas, dit-il. La victoire est une question d'efforts et de talent. Parfois, on doit savoir se dire que l'adversaire, à un moment précis, était meilleur. Il faut être capable de passer à autre chose.» Cette sagesse lui vient en partie d'une douloureuse expérience qu'il a vécue lorsqu'il a perdu un enfant six semaines après sa naissance. «Ça a été un gros deuil», confie-t-il. Mais Paul Deshaies a su faire preuve de résilience. «J'avais deux autres enfants, une femme, j'étais en santé, j'avais une job que j'aimais, dit-il. La blessure est demeurée, mais ce n'est pas dominant.» Selon lui, il faut profiter au maximum de chaque journée et utiliser le temps pour faire des choses qui nous rendent heureux. «Pour ma part, je n'ai pas d'énergie à perdre à être de mauvaise humeur», conclut-il.

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